Algodystrophie sévère
Je souhaite donner mon témoignage au sujet de mon parcours avec l’algodystrophie. J’ai 67 ans. Suite à une fracture du poignet en tombant sur le verglas en février 2012, j’ai eu immédiatement une algodystrophie très sévère main – coude – épaule, diagnostiquée par le chirurgien au bout de 5 semaines. J’ai eu la chance d’être prise en charge très vite par un algologue curieux de toutes les innovations, qui m’a fait me soigner moi-même : protocole Moseley*, pour lequel je me suis créé une banque d’images de mains, rééducation sensitive basique (comparer les sensations des deux mains sur différentes surfaces et essayer de les harmoniser) et auto-kiné dans un bac de semoule et lentilles mélangées. Je suis passée de l’Ixprim – peu efficace, comme la plupart des antalgiques classiques – au Lyrica, que j’ai supporté à petite dose (150 mg/jour), au-delà j’avais des vertiges et le cerveau en vrac. L’œdème a bien été résorbé par de l’Arnica en 5 CH.
J’ai aussi fait des séances de kiné pour continuer à progresser, avec un kiné spécialiste de l’algodystrophie, formé en fasciathérapie, et qui m’a fait beaucoup travailler en virtuel…
En parallèle, j’ai trouvé moi-même une excellente hypno-thérapeute spécialiste de la douleur, qui m’a permis assez vite de me passer d’antalgique… et de refuser la kétamine que voulait m’imposer l’algologue, ahuri que « ça ne guérisse pas plus vite »… J’ai tenté tout ce qui pouvait me faire du bien (acupuncture, réflexologie, cohérence cardiaque, EMDR, magnétothérapie, soins énergétiques…) et je décerne la palme conjointement à l’hypnothérapie pour la gestion de la douleur et à la fasciathérapie. J’ai récupéré assez rapidement la mobilité complète de l’épaule et du coude, en partie celle de la main, sans douleur ajoutée, ce qui est rarement le cas en kiné classique.
J’ai cependant des séquelles importantes : ulna (cubitus) déplacé de quelques millimètres (en 2 à 3 mois), ce qui bloque en partie les mouvements du poignet ; tous les doigts sont en griffe, les tendons s’étant rétractés dès la phase chaude. Il me reste une extrême sensibilité au froid l’hiver, suite à une allodynie** osseuse qui a persisté plusieurs années et rendait douloureuses toutes les vibrations. En revanche, l’allodynie cutanée est désormais résorbée, mais il m’a fallu au moins 4 ans pour retrouver des sensations normales.
Inscrite dans un groupe de soutien, j’ai rapidement partagé mes soins atypiques, puis entrepris la rédaction d’un livre (toujours en cours) qui prend en compte toutes mes lectures et traductions de spécialistes (particulièrement anglo-saxons) et les recherches que j’ai entreprises avec la participation des membres du groupe.
Je pense pouvoir affirmer désormais que toutes les algodystrophies ont une origine neurologique, et que la migration est due en grande partie au fait que les lésions nerveuses des membres, invisibles à l’imagerie dans 80 % des cas, soient forcées au quotidien (il faut bien vivre, et les soignants préconisent de « bouger pour ne pas s’enraidir ») et de façon prématurée en rééducation, puisque l’algodystrophie est toujours considérée comme une pathologie osseuse et articulaire…, les soignants fermant les yeux sur toutes les « bizarreries » dont témoignent les patients.
Je peux témoigner aussi que cette pathologie méconnue n’est pas si bénigne qu’on le dit, qu’elle ne guérit pas forcément spontanément, pas forcément dans le délai de 2 ans (ce qui est enseigné en général) et qu’elle peut s’aggraver de façon dramatique et devenir systémique. J’ai publié une partie de mes recherches sur mon blog algosdrc.free.fr, une autre partie dans les fichiers du groupe dont je suis l’administratrice active : Algodystrophie Tous contre toi… et le reste est encore en brouillon sur mon PC… Merci de votre action.
Mme J. de Loire-Atlantique
* Programme d’imagerie motrice, basé sur une rééducation du cerveau et l’utilisation de la latéralité pour s’auto-guérir.
** Allodynie : douleur provoquée par un stimulus qui ne cause habituellement pas de douleur.